L’État épinglé par la justice : Il indemnise une famille française pour 55 heures de français manquantes en 6e
L’absence d’un professeur devient un manquement légal
Durant l’année scolaire 2022-2023, une élève de Lys-lez-Lannoy (Nord) n’a bénéficié que de 107 heures d’enseignement en français, contre les 162 heures prévues par le programme officiel. Soit un déficit de 55 heures — une proportion jugée « substantielle » par le tribunal. Selon les juges, cette carence a inévitablement entraîné chez l’élève des lacunes et un retard scolaire avérés.
Face à cette réalité, la responsabilité de l’État ne pouvait être éludée. Le ministère de l’Éducation nationale, rappelle la décision, a l’obligation de garantir l’enseignement effectif de toutes les disciplines obligatoires. Ne pas remplacer un enseignant absent sur une période aussi longue constitue donc une faute de service public.
Un phénomène généralisé, mais inégalement réparti
Ce cas n’est pas isolé. En septembre 2025, une enquête du syndicat Snes-FSU révèle que plus de la moitié des établissements du second degré en France — précisément 55 % — manquaient au moins d’un enseignant. Ce chiffre, stable depuis 2024, cache des disparités géographiques importantes.
Les académies les plus touchées en 2025
- Lyon : 75 % des collèges et lycées affectés
- Créteil : 72 %
- Normandie : 57 %
La crise ne vient pas seulement du recrutement, mais surtout du manque criant de professeurs remplaçants. Même des absences planifiées, comme les congés maladie de longue durée, restent souvent sans solution.
Un seuil critique pour engager la responsabilité de l’État
La même famille avait également porté plainte concernant l’absence de 19 heures de physique-chimie en classe de 3e pour un autre enfant. Cette fois, le tribunal a rejeté la demande. Pourquoi ? Parce que, selon la jurisprudence émergente, seule une privation « appréciable » du programme scolaire peut fonder une condamnation.
Le seuil semble donc fixé autour de 30 à 35 % du volume horaire annuel. Un critère flou, certes, mais désormais opérant. Il marque une évolution : l’enseignement n’est plus seulement un service offert, mais un droit exigible.
Et demain ?
Au moment où le débat sur le salaire d’un député en 2025 occupe l’actualité, cette indemnisation symbolique — 470 € — pose une question plus large : combien coûte réellement l’abandon scolaire silencieux ? Combien vaut une heure de savoir non transmis ?
Si cette affaire ne résout pas la crise structurelle de l’Éducation nationale, elle en révèle les conséquences juridiques. Et elle arme les familles d’un nouveau levier : la justice administrative. Une tendance à surveiller de près dans les mois à venir.
