Elle a tout fait dans les règles — et pourtant, elle a perdu 80 000 € à cause d’un squat
Elle n’avait pas demandé ça. Pas de conflit. Pas de drame. Juste une maison familiale, héritée avec amour, qu’elle voulait vendre tranquillement. Karine Lellouche, 55 ans, habitante du Bassin d’Arcachon, avait tout planifié : les papiers de succession, les diagnostics, le notaire. Le printemps était arrivé, et avec lui, l’espoir d’un avenir plus serein. Ce n’est pas ce qu’elle a trouvé. Quand elle a ouvert la porte de la maison, elle a vu un inconnu. Assis. Tranquille. Comme s’il y vivait depuis toujours.
Une porte ouverte, une loi inadaptée
L’homme n’avait pas forcé. Il n’avait pas cassé. Il avait simplement entré — selon lui — parce que la porte était grande ouverte. Un détail. Un mot. Une phrase qui a tout changé. La loi anti-squat de 2023, saluée comme une avancée majeure, prévoit des expulsions rapides… mais seulement si l’entrée est illégale. Ici, pas de cambriolage. Pas de bris de serrure. Juste un homme qui a dit la vérité — ou qui a eu la chance que personne ne la contredise. Le préfet a rejeté la demande d’expulsion. Aucune preuve d’effraction. Aucun motif légal. La maison restait occupée. Et Karine, impuissante.
Des semaines de silence, puis une violente retombée
Elle a attendu. Elle a écrit. Elle a appelé. Rien. Puis, en septembre, tout s’est effondré d’un coup. L’occupant a été agressé. Deux personnes ont été interpellées par le parquet de Bordeaux. Et soudain, ce n’est plus lui qui est en cause. C’est elle. On la soupçonne d’avoir orchestré l’attaque. On la convoque. On la garde à vue. Elle ne comprend pas. Elle n’a rien fait. Elle n’a pas envoyé de gens. Elle n’a pas menacé. Elle a juste voulu retrouver sa maison. Pourtant, dans l’ombre des procédures, elle est devenue la suspecte. Même si l’enquête n’a rien prouvé, la blessure est là. La confiance, brisée.
La vente : une solution amère, un prix exorbitant
Elle n’avait plus le choix. Le promoteur, qui avait signé une promesse de vente avec clause de libération du bien, a imputé 80 000 euros à la transaction. Pas un rabais négocié. Une déduction imposée. Parce que la loi ne lui permettait pas de livrer ce qu’elle avait vendu : une maison vide. Ce n’est pas une perte de chiffre. C’est une perte de sens. Une injustice qui se transforme en chiffre. Un bien qu’elle n’a jamais revendiqué comme un simple bien immobilier. C’était la maison de son père. Et elle a dû la vendre, comme un objet défectueux.
La loi existe — mais elle ne protège pas toujours ceux qu’elle prétend défendre
Vincent Jeanbrun, ministre du Logement, reconnaît une faille. Sur CNews, il l’a dit clairement : quand un squatteur affirme avoir pénétré légalement — par un ancien bail, une autorisation orale, ou simplement une porte non verrouillée — la machine administrative se bloque. La trêve hivernale, les délais de recours, la charge de la preuve : tout pèse contre le propriétaire. La loi Kasbarian a triplé les sanctions. Elle a accéléré des milliers d’expulsions. Mais elle n’a pas pensé à ces cas-là. Ces cas où la vérité est floue. Où la loi ne voit que des faits. Pas des histoires. Pas des vies.
Les réalités du squat en France en 2025
- 432 demandes d’expulsion enregistrées entre septembre 2023 et mai 2024 dans 27 préfectures
- Île-de-France reste la région la plus touchée — mais les cas augmentent en zones rurales
- La trêve hivernale (1er novembre – 31 mars) suspend toute expulsion, même en cas de détention illégale
- 80 % des demandes d’expulsion sont rejetées si aucune preuve d’effraction n’est apportée
Que faire si vous êtes confronté à un squat ?
Ne prenez jamais les choses en main. La violence, même symbolique, peut vous coûter bien plus que la maison.
- Appelez la gendarmerie immédiatement — même si la porte n’est pas forcée. Faites un constat officiel.
- Photographiez chaque détail : dates, signatures, état des lieux, objets personnels du squatteur.
- Envoyez un courrier recommandé au préfet — citez expressément la loi du 27 décembre 2023.
- Consultez un avocat spécialisé en droit immobilier avant toute autre action — une erreur peut vous coûter la propriété.
Karine Lellouche n’a jamais cherché à faire du bruit. Elle n’a pas posté sur les réseaux. Elle n’a pas demandé de pitié. Elle a juste voulu vivre en paix dans sa maison. Elle n’a rien fait. Et pourtant, elle a tout perdu. Son histoire n’est pas exceptionnelle. Elle est révélatrice. Une loi peut être juste. Mais si elle ne prend pas en compte la complexité humaine, elle devient une prison pour ceux qu’elle devait libérer.
