Alcool à l’Assemblée nationale : Larcher s’emporte contre “les interdictions à tout-va”
Alors qu’un député propose d’interdire la vente d’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale, Gérard Larcher a réagi avec irritation. Pour le président du Sénat, cette idée relève du “gadget” alors que la France fait face à des défis budgétaires majeurs. Entre débats de fond et détails symboliques, la polémique relance une question ancienne : faut-il tolérer l’alcool dans les lieux de travail parlementaires ?
Pourquoi cette proposition d’interdiction ?
Le 31 octobre 2025, le député écologiste Emmanuel Duplessy a publié un rapport recommandant la fin de la vente d’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale. Deux raisons principales motivent cette mesure : réduire les dépenses publiques et aligner les pratiques parlementaires sur les règles de droit du travail, qui interdisent globalement la consommation d’alcool sur les lieux professionnels.
En France, la loi tolère exceptionnellement certaines boissons alcoolisées pendant les repas, mais jamais en dehors de ce cadre. Or, à l’Assemblée, les élus peuvent commander du vin, du whisky ou du Get 27 — et régler ces consommations directement via leurs frais de mandat.
La réaction cinglante de Gérard Larcher
Invité de CNews le 6 novembre 2025, Gérard Larcher n’a pas caché son agacement. « J’en ai assez de ces prohibitions, de ces interdictions », a-t-il lancé, jugeant la proposition déconnectée des priorités nationales.
Le président du Sénat a rappelé que le pays doit emprunter 310 milliards d’euros dans le cadre du projet de loi de finances 2026, et qu’une demande d’emprunt de 83 milliards sera examinée la semaine suivante. « Il y a des choses importantes et des choses accessoires », a-t-il insisté, qualifiant l’interdiction d’alcool de distraction inutile.
Une culture parlementaire sous surveillance
Pourtant, plusieurs témoignages suggèrent que la consommation d’alcool à l’Assemblée dépasse parfois le cadre de la simple convivialité.
En 2023, Roselyne Bachelot déclarait sur BFMTV avoir vu des députés « cramponnés au micro », visiblement éméchés. L’année précédente, un député macroniste évoquait dans Le Parisien une soirée de juillet où la buvette avait été « assiégée », avec des stocks de whisky et de Get 27 entièrement épuisés. Il précisait alors que « la France insoumise avait pris une sacrée part à la beuverie ».
Un privilège en décalage avec la loi ?
Contrairement à la plupart des salariés français, les parlementaires bénéficient d’un accès facilité à l’alcool en journée, sans restriction horaire ni contrôle. Cette exception, héritée d’une tradition politique ancienne, suscite de plus en plus de critiques dans un contexte de rigueur budgétaire et de lutte contre l’alcoolisme au travail.
Le débat n’est donc pas seulement symbolique. Il touche à la transparence des frais de mandat, à l’exemplarité des élus et à la cohérence du droit du travail.
Ce que dit la loi
- La consommation d’alcool est interdite sur les lieux de travail (article R. 4228-20 du Code du travail).
- Exception : boissons alcoolisées autorisées pendant les repas (vin, bière, cidre, poiré).
- Les parlementaires ne sont pas soumis à cette règle dans l’enceinte de l’Assemblée.
- Leurs dépenses en buvette sont remboursées dans le cadre de leur enveloppe de représentation.
Et maintenant ?
La proposition d’Emmanuel Duplessy n’a pas encore été mise aux voix. Mais elle alimente un débat plus large sur les privilèges parlementaires, les dépenses des élus et la modernisation des institutions.
Entre ceux qui y voient une mesure de bon sens et ceux qui y perçoivent un “procès d’intention”, la question de l’alcool à l’Assemblée nationale risque de faire couler beaucoup d’encre — et peut-être un peu moins de whisky.
