Choc médiatique : France 2 retire in extremis une séquence sur CNews après la contradiction de l’Arcom
Une affaire rare vient d’ébranler le paysage audiovisuel français. Jeudi 27 novembre 2025, l’émission d’investigation « Complément d’enquête » sur France 2 a dû supprimer en urgence une partie de son reportage consacré à la ligne éditoriale de CNews, après que le régulateur Arcom eut contredit publiquement les données avancées par Reporters sans frontières (RSF). L’incident illustre les tensions croissantes autour du pluralisme politique à la télévision — et la fragilité des accusations médiatiques lorsqu’elles reposent sur des méthodologies contestées.
Une enquête suspendue à un fil
❗️« Il n’y a aucun ressortissant gazaoui qui ait été installé à l’hôtel de ville de Charenton » assure le maire LR de la ville, contrairement à ce qu’a annoncé un bandeau diffusé sur CNews en septembre dernier.
📺 Rendez-vous ce soir à 23h00 sur https://t.co/YC40VBfmKh pic.twitter.com/OQguUlP5yE
— Complément d'enquête (@Cdenquete) November 27, 2025
Le reportage, prévu pour durer une heure, devait s’appuyer sur une étude de RSF affirmant que CNews violait les règles de pluralisme en reléguant les voix de gauche — notamment La France insoumise et le Parti socialiste — aux tranches nocturnes, tandis que l’extrême droite (RN, Philippe de Villiers) dominait l’antenne en prime time. Selon RSF, entre le 1er et le 31 mars 2025, cette dernière y aurait bénéficié de 40,6 % du temps de parole politique, contre seulement 15,4 % pour l’ensemble de la gauche.
Mais le même jour, l’Arcom, autorité de régulation indépendante, a publié un démenti cinglant : après analyse des mêmes données, elle affirme n’avoir « constaté aucun contournement des règles du pluralisme politique sur CNews en mars 2025 ». Pire : selon ses propres chiffres, les partis de gauche seraient même surreprésentés, de jour comme de nuit.
France 2 contrainte de couper en catastrophe
Face à ce revirement institutionnel à quelques heures de la diffusion, France Télévisions a pris une décision exceptionnelle. « Étant dans l’impossibilité technique d’ajouter cet élément contradictoire aussi près de l’heure de diffusion », a indiqué l’entreprise à l’AFP, « nous n’avons eu d’autre choix que de couper la séquence concernée ». Une telle suppression en dernière minute est extrêmement rare pour une émission d’enquête de ce format.
Cette affaire soulève une question centrale : peut-on accuser publiquement un média sans que les données soient validées par le régulateur officiel ? Et surtout, qui décide de ce qui constitue une violation du pluralisme télévisuel ?
RSF maintient ses accusations, CNews riposte
Malgré la position de l’Arcom, RSF refuse de revenir sur ses conclusions. Dans un communiqué, l’ONG affirme maintenir « tous ses chiffres et ses conclusions », estimant que le régulateur « conteste manifestement, sans fournir de chiffres en appui ». RSF précise avoir analysé plus de 700 000 bandeaux d’antenne grâce à un outil de capture automatisée, couvrant les quatre chaînes d’info en continu : CNews, BFMTV, LCI et franceinfo.
De son côté, Pascal Praud, figure phare de CNews, a répliqué avec virulence ce vendredi dans « L’Heure des Pros » : « RSF s’est appuyée sur une étude manifestement bidon et des paramètres de jugement biaisés », a-t-il lancé, accusant l’ONG de partialité idéologique.
Un débat plus large sur l’information et l’équilibre démocratique
Au-delà de ce bras de fer, l’affaire relance le débat sur le rôle du régulateur, la transparence des méthodologies d’analyse, et la définition même du pluralisme médiatique. Alors que RSF envisage de saisir l’Arcom sur cette base, d’autres observateurs pointent le risque d’une instrumentalisation des données à des fins politiques.
Dans un contexte de fragmentation de l’information et de défiance croissante envers les médias, cet épisode montre à quel point la question du temps de parole politique à la télévision reste un enjeu sensible — et potentiellement explosif.
