Toto, le zéro en rédaction et la blague du caca d’Albert qui fait rire depuis des générations
Le zéro de Toto en rédaction est bien mérité
Papa est furax. Le genre de colère froide, celle qui monte lentement, comme une mayonnaise qui tourne. Il tient à la main le cahier de rédaction de Toto, et dedans, un seul chiffre : 0/20. Un zéro si gros, si rond, qu’il semble crier sa honte depuis la page.
— Comment ça se fait ? demande papa, la voix tendue comme un élastique sur le point de lâcher. D’habitude, tu as de très bonnes notes en rédaction…
Toto hausse les épaules. Ce geste universel de l’enfant qui sait qu’il est dans la mouise, mais qui espère encore que le miracle d’une excuse bidon fonctionne.
— Ben… répond Toto, avec cette économie de mots qui fait toute la richesse du langage enfantin.
— Fais-moi voir ton texte ! ordonne papa, comme s’il convoquait un témoin à la barre.
Et là, il lit. Et là, il regrette.
« En me promenant dans la forêt, au détour d’un chemin, j’ai vu un caca tout vert : c’était le caca d’Albert. Un peu plus loin, j’ai vu un caca tout noir : c’était le caca d’Édouard. Au pied d’un arbre, j’ai vu un caca tout gris : c’était le caca de Denis… »
Papa relève la tête. Ses yeux sont deux points d’interrogation flottant dans un océan de désespoir parental.
— Mais qu’est-ce que c’est que ça, Toto ?! C’est une chronique de zoo ou un journal intime de vétérinaire ?
— Ben… c’était le sujet quoi !
Papa, sceptique, attrape la feuille du sujet. Il lit à voix basse, puis à voix haute, comme s’il espérait que les mots changent d’eux-mêmes :
Sujet : C’est dans le besoin que l’on reconnaît ses amis.
Un silence. Un silence si profond qu’on pourrait y enterrer trois générations de malentendus familiaux.